Suite à la recension de son roman Tanael et le livre de vie, nous avons interrogé le père Matthieu Dauchez :
Pourquoi avez-vous éprouvé le besoin de rédiger un roman alors que vous êtes prêtre aux Philippines ? Pourquoi ne pas raconter quelques témoignages de votre apostolat auprès des enfants de la rue ?
Depuis le début de mon ministère, j’ai toujours gardé ce désir chevillé au corps qu’il faut se mettre à l’école des plus pauvres. La sainte de Calcutta disait : « C’est la mode de parler des pauvres, mais ce n’est pas la mode de leur parler », il faudrait ajouter, ce n’est pas non plus la mode de les laisser parler. J’ai cette conviction indéfectible qu’ils sont des évangiles vivants et qu’il faut entendre leurs leçons. C’est ce qui a motivé la rédaction de plusieurs essais les années passées. Mais un roman me donne l’opportunité non plus de parler en leur nom, mais de les laisser parler eux-mêmes. C’est ainsi que ce roman, trop ambitieux probablement, se veut aussi être un témoignage et un approfondissement de la foi car au cours d’une trame qui suit les aventures d’un enfant de la rue à la recherche de sa petite soeur disparue, une rencontre inattendue le met sur un chemin de foi. Il fait la découverte merveilleuse d’un Dieu d’amour, et nous incite à faire la même découverte, avec lui.
Parlez-nous un peu de vous : qu’est-ce qui vous a amené à Manille ?
La Providence, sans aucun doute. Originaire de Versailles et très casanier de surcroît, rien ne me destinait à partir au bout du monde, mais un concours de circonstances bien guidé m’a fait partir jusqu’aux Philippines en 1998, avec trois amis, pour assister un prêtre missionnaire dans le lancement de la fondation ANAK-Tnk qui aide les enfants les plus défavorisés de Manille. Sur place, j’ai très vite compris que pour une telle mission, il ne pouvait s’agir d’une année ou deux, mais que le Bon Dieu m’appelait mystérieusement à donner ma vie au service des plus pauvres. Un appel dans l’appel.
Le jeune garçon que vous mettez en scène, Ânjo, se montre très solidaire (il aide une femme âgée au quotidien, il sauve un enfant d’un incendie…). Cette solidarité au sein des enfants des rues est-elle vraiment une réalité ? Nous pourrions imaginer que ne règnent dans les rues que l’individualisme, l’égoïsme et la violence.
Le roman met en scène Ânjo, un personnage certes imaginaire mais qui s’inspire toutefois de nombreux jeunes des rues rencontrés dans le cadre de la fondation. Et tout ce qui est relaté dans le livre se base sur des histoires vraies : les dangers terribles comme les réactions héroïques sont plus de l’ordre du témoignage que du roman. Dom Gérard a écrit ces mots magnifiques : « Il faut consentir à la nuit pour apercevoir les étoiles ». Ils illustrent puissamment les réponses profondément chrétiennes qui surgissent au coeur de l’enfer de la capitale philippine. Les pauvres sont nos maîtres, sachons devenir disciples.
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